Je réutilise des vieilles playlists pour faire la soundtrack de nos baises – ou c’est ma voix, la tienne, des cris puis des gémissements pas tant lisses – on se dit aussi souvent je t’aime, au travers des heures qui disparaissent, organiques, profondes, juteuses. On se frenche intense, je me perds dans les méandres de mon corps qui sait plus trop comment recevoir du plaisir, à force d’avoir encagé mon désir pour pas qu’il vire hors de contrôle – ça fait des mois qu’on est pris en dedans, aussi, la putain de pandémie tu dis, on attend le printemps qui revient pas trop vite et la glace fond. Mouille goutte à goutte, neige molle, coup d’eau. Et moi avec. Tu me lèches pendant des heures, tu dis que je goûte différent selon comment je m’excite, et la texture changeante – umami de ma chatte.
On baise encore high, l’histoire de ma vie – ou peut-être était-ce un autre, cet autre dont je fais patiemment le deuil, encore surprise de trouver sa trace tristesse jusque dans les replis de mon sexe humide – l’amour sous substances qui font et défont les liens d’énergie – décrissent nos barrières, aplanissent les fibres de mon ventre, alimentent les images dans ma tête lorsque tu me serres fort en cuillère. Pour me protéger, tu dis. Le THC me dessine des ailes – tes ailes – et je m’envolerai presque si j’avais pas tant le vertige.
J’y crois un peu, parfois, souvent, à ce que tu me racontes et la sécurité qui se construit semaine après semaine, ça fait que quand je reviens à moi après j’ai plus le goût de laver mon linge parce qu’il sent ton parfum et que ça ranime ta présence à chaque inspire. Sucré, comme ta peau tes lèvres ton jus. Je
t’aime en criss
ponctue mes phrases de ces mots qui sont pas ma culture, absorbée comme l’île par le Fleuve depuis toutes ces années j’en ai fait ma musique en dedans – laisser couler les mots comme ils sonnent, rauques et drus, les diphtongues et les accents toniques m’échappent encore. Mais je sais crier fuck me quand j’orgasme, bilinguisme oblige.
Je sais pas où ça commence, encore moins où ça se termine. Je te raconte comme j’en ai raconté tant d’autres, croyant à chaque fois que ce serait le dernier, l’ultime. On s’en fout rendus ici, tout ce qui compte c’est le voyage, l’amour est un mot qui me rend docile et te permet de me posséder à l’occasion, safer container to support growing edges. On joue, tu mords, je jouis, l’effet du weed s’estompe. Il est temps de rentrer chez moi te rêver à nouveau.
Oh, et puis je voulais te dire, je t’aime. Je l’ai retenu cent fois, peut être plus, alors qu’on marchait sur cette plage, du sable plein mes chaussures et le vent dans mes cheveux. Je l’ai crié dans ma tête assez fort, noyée sous la tendresse de tes baisers, perdue dans l’océan de tes yeux, soumise à la décision de tes doigts entre mes cuisses, tes mains sur ma peau, tes lèvres sur mon corps, ton corps si près du mien. Je l’ai pris comme une évidence, à la seconde où tu es apparu sur ce quai de gare, l’instant où je suis descendue du train, ou peut être un peu plus tard, lorsque sur les bords de l’Erdre on s’est parlé de tout et de rien retrouvant le goût des conversations d’il y a trop longtemps. Ou c’était dans tes draps, tes mains jouant à dénuder mon corps et découvrir ma peau, ton odeur familière, tes baisers maladroits, l’assurance pourtant de se connaitre par coeur – mais j’avais peur, si peur, et je t’ai dit, j’ai froid, je suis fatiguée, j’ai tellement été sollicitée que je me sens vide à l’intérieur, alors je sais pas, ce que je peux t’offrir, je sais plus trop qui on est, ce qui reste, nous – et tu as posé tes mains sur moi et ton corps pour me réchauffer et chuchoter des mots tendresse et des mots désir, et puis on a fait l’amour, doucement, et je me suis souvenue de ce que ça voulait dire, faire l’amour, le sens de tout ça, ta queue dans ma bouche, ta bouche sur mes seins, tes mains sur mon cul, ta queue dans mon ventre, mes cris, le parfum de ta peau, ta façon de me toucher, et de m’embrasser, et de me regarder, et soudain j’étais belle à nouveau, et soudain j’étais vivante, et soudain j’étais pleine – pleine de toi, et ton orgasme, et le plaisir partout qui coule entre mes jambes, et putain. Je me suis souvenue ce que c’était, ce truc immense qui nous emportait tous les deux, je me suis souvenue ce que c’était le sexe sans alcool, sans drogue, sans artifice ni déguisement, le sexe qui fait des frissons en dedans et mouille mon désir si fort, le sexe où je peux ouvrir les yeux pour exister dans le présent. Je me suis souvenue que c’était réel, que j’en étais capable, que ça avait du sens tout à coup, que ça pouvait m’arriver à nouveau. J’ai voulu crier encore mais ma voix s’est brisée dans ma gorge, et j’ai même pas pleuré, on s’est juste regardés sans rien dire, et puis.
On a pris la voiture et t’as oublié de fermer la porte et on a roulé en discutant de la vie et de politique et de ton avenir et de là où je vis, et puis on a traversé un bout d’Océan comme pour s’en rapprocher un peu plus, et on est allés sur la plage, marcher, il y avait du vent, et des cailloux et je souriais parce que c’était beau et que toi aussi, t’étais beau avec tes yeux pépites et tes tâches de rousseur, et j’avais constamment envie de ta bouche et de nous rouler dans le sable comme on faisait avant, mais j’ai pas osé parce que j’avais peur, peur de trop en faire, peur de t’étouffer, peur que tu ne comprennes pas alors on a fait des ricochets et j’avais envie de crier au monde que j’étais bien avec toi, à faire des ricochets tout croches sur une marée montante et des vagues ridicules, mes Vans pleines de sable et les cheveux dans les yeux, j’avais envie de te dire de plus jamais repartir, plus jamais me faire ça parce que merde regarde on est si bien à deux – mais j’ai rien dit, c’était moi cette fois qui était de passage, moi qui allait repartir, moi qui savait plus croire pour deux. Plus tard on est rentrés et on a parlé de voyage et je t’ai dit que je voudrais voyager, c’est à cause de toi tout ça, et tu m’as dit que j’étais un peu chiante quand même et t’avais raison et je sais que je serais capable de supporter n’importe quoi pour être avec toi dans un ailleurs commun. La chambre d’hôtel était blanche, on a baisé sur le lit, tu as pris mon cul parce que c’était comme ça et j’ai crié trop fort, ta bite en dedans et mes doigts sur mon clito et ta bouche partout et l’orgasme, on a dormi un peu et il était le soir avec une si jolie lumière dans la chambre – j’ai pris ce selfie où on m’a dit que j’étais belle mais j’étais juste heureuse, juste bien, juste là au présent près de toi endormi, de ce toi qui me laisse être moi toute entière et qui sourit à mes blagues débiles en embrassant mon cul. Le resto était bon, on a parlé politique, encore, et sans même s’engueuler, et j’ai pensé que tu avais mûri, et que je m’étais calmée, et qu’on arrivait finalement à se trouver dans ce quelque part au milieu de nous deux, après l’addition on a marché une heure encore il faisait presque frais et l’iode qui collait à nos cheveux et les discussions sans fin nos pieds crissant sur les graviers. Et puis encore la chambre où j’ai massé ton corps et avalé ta queue, et le sexe encore si fort, une douche brûlante pour la nostalgie des printemps passés.
Lendemain déphasé où on ne compte plus les heures, la route au milieu des champs et des marais et la boule qui grossit dans mon ventre, le sexe encore si tendre alors que mon ventre brûle, s’endormir l’un contre l’autre comme une habitude jamais perdue. Les ruelles de la ville observent nos mains s’attraper, on parle pour meubler le vide, assis sur un quai tu fais celui sur qui tout glisse, je te connais, je crois, je te sens là, quelque part, pas si loin – je dis tu viendras me voir mais je sais bien que non, je sais bien le champ des possibles, je sais bien que je vais devoir apprendre à nouveau à t’oublier – parce que c’est ainsi. Des kilomètres jusqu’au bord d’un lac pour un dernier baiser, le ciel si près des nuages, si près de cette immense flaque d’eau, si près des oiseaux qui s’envolent silencieux – je crois qu’on ne veut plus rien se dire et les mots gueulent encore dans ma poitrine mais je me tais et on marche doucement sur ce chemin boueux pour retourner à la voiture, une aigrette blanche à travers les arbres, si près qu’on pourrait la toucher.
–
Un aéroport, comme une habitude, des au revoir dans lesquels on ne sait pas se dire adieu. J’observe ton dos s’éloigner en enregistrant ma valise, et je me souviens de ce qu’on se disait il y a un an – faut pas pleurer – et je ne pleure pas mais quelque chose en moi a brûlé trop fort, je te sens encore bouger entre mes reins, ton parfum sur ma veste, ton odeur sur ma peau. Le temps n’a plus vraiment de consistance, tout s’évapore alors que j’observe la terre s’éloigner, et je pense à toutes ces villes qui vues d’avion ressemblent à des îles une fois la nuit tombée.
Mon île à moi m’attend, je rentre chez moi. Ou chez nous. C’est selon.
Je t’aime encore, ou à nouveau, comme depuis des mois, je me tais.
Dans le métro j’observe les gens, couleurs, odeurs, peaux. Ton corps me manque, mon amour. Je voudrais te croiser par hasard, te serrer contre moi sans les mots, comme on se retrouve après un long voyage – après tout c’est de ça dont il s’agit. Je pense à ta bouche et je m’obsède. Ta barbe sur ma peau. Le bruit si doux de tes plaisirs. Je n’oublie pas la passion de nos dimanches après-midi. Je cherche un sens à la distance, et tout ce qui répond c’est l’appel de mon ventre, le désir flamme pour nous dévorer à nouveau.
–
On s’est raconté si souvent nos rêves, nos idéaux. À la mesure de notre désir, je nous voulais immenses, vertigineux, et libres. Tu m’expliquais patiemment comment la somme de toi+moi tendait avec certitude vers l’infini. De la part d’un ingénieur, je te croyais dur. On se promettait l’Amour, le sexe, un toit, et des bébés. On se racontait nos baises, nos fantasmes, les autres gens avec qui on aurait fait l’amour – on aurait baisé la Terre entière de toutes ses belles personnes si on avait pu. On était insatiables. Ça nous excitait, et tu avalais mon corps et mon jus comme un affamé. Je me sentais si belle. Unique. Parfaite. Je gémissais de tes coups de langue et criais sous tes coups de queue. J’ai souvent pensé, je l’avoue, que ma jouissance suffirait à te rendre heureux.
En deux ans moins quelque chose on en a bouffé des litres de fluides en échantillons, dans ma bouche et la tienne et ma chatte et ton cul. Le tien aussi, perforé par un phallus de silicone. J’ai pénétré ta gorge, ton ventre, ton coeur, ton cerveau, et puis, un jour, la connexion a disparu. Qui es-tu, où es-tu, que résonne le nous.
Je t’ai lancé sur tellement de pistes pour que tu te trouves qu’après tout ça, je t’ai perdu. Qui es-tu, je t’ai dit, et tu savais pas vraiment me décrire, et puis tu ne savais plus rien, alors on a essayé ensemble encore et encore, toutes les formes, tous les genres, tous les mots, tous les contenants. Trouve-toi, je te supplie, trouve ta forme et ta direction pour que tu puisses à ton tour me contenir.
Je t’aimais si fort, trop fort, je te voulais heureux, paisible, ancré ; je te voulais à l’image que je me faisais de toi, je voulais tellement t’y voir et que tu sois enfin ; peut-être qu’au travers des errances où tu t’es laissé emmener, dans la chaleur de mes bras rassurants et mon optimisme infaillible, peut-être, j’ai fini par t’étouffer.
–
Un peu plus tard assise à côté de moi il y a une fille cheveux bleus, veste cuir, et je suis cuir et rose moi aussi. Le métro shake, ligne verte presque vide, je traverse la ville d’un bout à l’autre dans l’espoir d’y croiser le souvenir de ton regard bleu-barbe. J’espère que quelque part ton coeur bat encore, j’espère exister toujours dans ton espace de vie, j’espère que la douleur du nous n’a pas submergé les dernières traces du désir d’être unis.
J’espère que bientôt, demain peut-être, on refera l’Amour à deux.
Des mots, chuchotés dans le noir, des notes de pianos pour accompagner le flux. Les yeux clos, sur mon initiative, nous écoutons nos respirations. J’ai senti le besoin de retrouver le centre, car ta présence dans cette pièce et quelques phrases échangées ont suffit à défaire mon ancrage. Je cours partout, je me cogne, je perds l’équilibre.
Alors respire. Encore. Ensemble. La boule de lumière qui brûle dans ton ventre, je peux la voir vibrer, se balancer avec tes inspires-expires, il suffisait de fermer les yeux pour se retrouver
– et j’ai confiance, même si je tremble un peu, j’ai peur tu vois, est-ce que tu peux sentir la vibration de mon coeur au travers des couches d’air qui séparent nos corps ?
inspire
Tes mains sur les miennes, brûlantes. Le calme revenu j’ai posé les mots pour nous ouvrir l’un à l’autre, et je suis entrée. À l’intérieur, comme dans une église, j’observe religieusement le silence, immobile devant la pureté qui émane de l’espace créé entre nous deux.
mouvement
Danse. Un pied après l’autre, transfert de poids, changement de côté, bras, paumes, présence jusqu’au bout des doigts. Je touche ta peau comme caresser ton âme, mise à nue, et tu t’offres si vulnérable que je te perçois jusqu’au fond de mon ventre, les émotions qui montent et racontent une histoire abstraite, sans pouvoir distinguer lequel de nous deux est en train de rêver. En cet instant, je sais que je t’aime comme une évidence subtile qui appartient à un autre présent, et je me demande, qui sommes nous, où et quand avons nous déjà communié, car je te vois, je te sais, je te reconnais. Je m’enfonce doucement, tu m’accueilles, c’est doux, chaud, tendre et humide ; immense et fluide, océan formé des courants nos intuitions. Je te touche, je me touche, je ne sais plus qui de toi ou de moi ressent les vibrations, à qui appartient ce qui résonne. Tu es beau dans ton lâcher-prise, je pense. Je t’écoute respirer. Je t’observe être, paisible, déposé entre mes bras. J’admire ton calme, et le Divin qui nous habite en cet instant.
silence
Le feu allumé, soupir. Je caresse encore ton corps, je te veux, je te sens, comment te décrire ce désir. Je m’abandonne à ta présence tandis que mes résistances à être tombent peu à peu. Je me promène sur ta peau, je voudrais te faire l’amour, et ce depuis si longtemps alors, je m’autorise à te pénétrer et me déposer en ton centre. Je voudrais te regarder, je ferme les yeux, et je te vois comme je ne t’ai jamais vu.
expiration.
C’était beau, dans ta bulle. J’ai eu les larmes aux yeux, émue et contemplative comme ça m’arrive plus si souvent. Il y avait dans mon ventre cette chaleur humide de quand on est amoureux. Lorsque tu es parti, la douleur bienveillante d’un bout de moi qui se détache, et puis, le vide.
Il aurait fallu que j’invente un mot, pour expliquer le mouvement qui nous jeta l’un vers l’autre et définit par la suite le lent cheminement qui nous mena directement vers la chute. Ce moment où, par fusion amoureuse, en voulant rassurer les peurs et l’égo, on s’est oubliés l’un dans l’autre. En joignant nos coeurs, nos têtes, en partageant chacun de nos instants, privés de la distance à franchir pour se rejoindre d’un bord à l’autre, petit à petit, et surtout, sans s’en rendre compte, on a cessé de se regarder.
Tu étais je et j’étais tu. Nous étions un, de ces clichés ambulants de l’Amour romantique, âmes soeurs, moitiés, un plus un égal un, nous sommes faits l’un pour l’autre, que ferais-je sans toi, je panique, mon amour, chéri, bébé, mon précieux, ne me quitte pas, sans toi, je ne suis plus rien, l’ombre de ton ombre, l’ombre de ton chien.
À deux nous n’étions pas plus forts, bien au contraire. Nous regardions pourtant dans la même direction, oubliant peu à peu le besoin d’être unique, partageant tout ou presque dans une intimité extrême. On aurait pu signer un contrat du sang de l’un de nous deux – sûrement le mien, puisque c’est ainsi que l’Homme-fort s’approprie la Femme-fragile dans les romans populaires à nuances de gris – pour autoriser l’autre à jouir et restreindre sa liberté à regarder d’autres culs. On aurait appelé ça l’Amour, et juré par tous les Dieux que c’était le vrai, le seul, l’unique – jusqu’à ce que la Mort nous sépare, ou presque, puisqu’on était destinés l’un à l’autre, on se retrouvera bien au Paradis.
Mais soudain, j’explose. Ou j’implose, c’est selon. Car le désir n’est plus, et le plaisir s’effondre tout aussi sûrement. Je réclame à corps et à cris le droit d’être regardée, désirée, objectifiée, car c’est ainsi, on ne baise plus. La charge érotique a pris le bord avec notre individualité. Nous faisons l’amour onanisme, machinal, préliminaires, coït, orgasme, et puis doucement coït, orgasme, enfin, débandade, assèchement, anorgasmie. Même le plus assidu des fappeurs a besoin d’images nouvelles pour inspirer le mouvement du poignet. Alors on dit, c’est la routine, l’âge, les enfants, le stress ; et on part en guerre contre l’ennui, acheter des sextoys, organiser des plans à trois, arrêter de péter au lit, tu pourrais faire un effort et mettre du rouge à lèvres, tu as pris du poids, tu ne t’épiles même plus. C’est le vagin confort comme des Charentaises, de celles qu’on enfile avec le pyjama, par habitude, parce qu’elles sont toujours au pied du lit.
C’est si triste, un vagin qui s’assèche et une bite qui ne bande plus, parce qu’on a oublié de nourrir le désir. Parce qu’on n’a plus le recul nécessaire pour s’observer vivre, plus l’espace d’être unique, plus la distance pour se regarder exister. C’est de l’amour presbyte. À force de se rapprocher par habitude et par peur de se perdre, on se perd l’un dans l’autre, et soudain, sans qu’on l’ait vu venir, l’autre n’y est plus.
Ya pas de morale ici. De toutes façons, c’est pas vraiment une histoire vraie. Juste une histoire ordinaire. À force d’avoir peur de se perdre, on en oublie parfois de se laisser de l’espace pour s’aimer.
Je titre : Éroticide.
Le suicide érotique, à petit feu. Une licence Disney.
Regarde, il y a des bouches et des chattes sur mon Tumblr mais on s’emmerde un peu. Des jambes aussi, très longues et très douces, à croire que j’aime aussi les femmes. On a fait l’amour par téléphone tout à l’heure, je t’ai raconté une histoire sale de fessées, levrette et tes doigts dans mon cul. Je me souviens alors de comment tu me faisais jouir avec deux doigts, un dans mon cul, un dans ma chatte, et ta langue entre mes lèvres. Je lis de la littérature érotique aussi, ça m’excite un peu trop tout comme les bras et les torses des garçons que je croise. C’est l’été, ils sont en t-shirt, j’y suis un peu trop sensible, et puis on est tombés sous les orages sur cette île au milieu du fleuve, tu y crois toi, les degrés se sont brisés avec les éclairs, comme pour fouetter le sol.
Je rêve un peu je rêve trop, des corps impatients, des vieux souvenirs de ce brun ténébreux au corps d’Apollon que j’ai pu considérer autrefois comme un amour de ma vie. Con de fantasme qui emmène bien trop loin, et en attendant je tourne en rond.
Je pourrais dire qu’il m’a réveillée, un réveil bien violent à coup de queue tendue, et c’était bon, le problème maintenant c’est d’assouvir l’envie – assouvir l’ennui, les nuits qui s’accumulent dans le vide, les corps qui ne tombent plus. Trouve moi, je suis lassée d’attendre, lassée des nuits sans lune, lassée de mouiller dans le vide.
Des cris. Des cris, et des corps. Amoncellement mouvant, mélange de textures, tapis de peaux, bouches, chevelures, bras et jambes, fesses, sexes humides. Cris, gémissements, respires, souffles courts, râles, et même,
des rires.
.
La scène se passe quelque part au bord du monde. Dans une grande maison, autour les arbres, la forêt qui bruisse, les montagnes. On a vu le soleil se coucher rouge sur l’horizon, d’un rouge sang comme le coeur d’un volcan, coincé entre deux montagnes et une frontière sans mur. On s’est assis en cercle, et on a parlé. Beaucoup, longtemps, et puis on s’est levés, en silence, on a marché jusque dehors. Il faisait froid mais pas tant, et tu t’es déshabillé. Pieds nus sur la glace pour mieux sentir la vérité du sol.
.
Intérieur, nuit. Après une danse au son des tambours, la folie nous a peut être pris. Les louves enlacées se mordent, griffent, s’avalent. Je les observe, superbes, exprimer leurs jouissances, et c’est magnifique.
Au milieu, sur notre île, mon instinct de chasseuse est doucement ranimé par le froissement de ta barbe sur ma peau. Sous tes caresses, je m’éveille tigresse, chatte, joueuse et sauvage. J’attaque ton corps de baisers, langues et morsures, tu me soulèves, on se chamaille, et des rires observateurs acclament notre lutte.
Agenouillée devant toi, ta paume claque sèche sur mon cul. Mes coups de dents ont laissé des traces, tu te venges, soulevant des regards curieux. Et puis, ta bouche entre mes cuisses, tes doigts enfoncés profonds dans mon ventre, vas et viens. Je respire fort, inspire, bloque trois secondes, expire, pour diffuser le plaisir. J’entends d’autres râles, des gorges déployées de plaisir, j’ouvre les yeux, je les vois elles et elle, et lui, leurs peaux presque dorées dans la lumière nocturne. Tant de désir. Tant de libertés. Je ne retiens plus. La vague de l’orgasme me cambre alors que j’enfonce ta face dans mon sexe trempé.
Et tu cries, à ton tour, lorsque je m’assois sur ta queue, tu cries lorsque tu la regardes, elle est belle, je trouve aussi, j’ai joins mes cris aux siens un peu plus tôt. Nous sommes beaux, si belles, et les louves ne finissent plus de s’embras(s)ent.
J’ai pris le temps de respirer un peu, des fourmis dans les membres. Je vibre, elle dirait, je vibre de toutes les énergies qui explosent sous le haut plafond, je vibre de cette lumière que seuls certains connaissent, je luis de l’Amour qui nous lie toutes et tous. Nous sommes vivants, vivants et lucides.
Car jamais nous n’avons été autant (r)éveillés.
.
Sous le ciel noir, un hurlement, repris bientôt par tant d’autres, pour crier à la face du monde qu’on était libres, libres et merveilleuses, dans l’ici et maintenant.
Je vous ai aimées si fort à cet instant. Je vous ai entendues, si puissantes, j’ai respiré la fraîcheur du vent sur mon visage et le reflet des nuages sur ma peau ; j’ai touché les arbres, leur écorce rugueuse et sèche de l’hiver ; j’ai senti la neige s’enfoncer sous mon poids au milieu de ce champ. Je me suis vue parmi vous, nous, les folles et les fous, de ceux qui croient en leurs rêves et qui connectent avec la Terre et les étoiles à la fois.
Cette nuit, j’ai rejoins la meute. Ensemble, nous nous sommes crus capables de tout renverser. À coups de corps, à coups de cris, à coups de baisers.
Assise dans cette cuisine, je laisse tomber mes yeux sur le catalogue du Suédois. Elle tombait amoureuse comme on tombe d’une chaise, je pense. Je ne sais plus qui a dit ça, un jour, et c’était très juste. Je ne tombe pas des chaises – je crois, j’ai un bon équilibre quelque part, perchée sur des talons et des escaliers de fer je tiens debout, sur une barre de pole, allongée sur une table, enfoncée sur
un pieu.
Le chat, le laptop, toujours ce même ballet. Un papillon de nuit a traversé la fenêtre, s’écrase contre la vitre, le chat tente de l’attraper. En vain.
La nuit tes doigts s’enlacent autour de mon cou, tes mains retrouvent la fraîcheur de ma peau, resserrent. La nuit j’envoie des messages masqués à des amants anonymes. La nuit je joue, le rôle qui me fera celle. J’ai mal au ventre, un peu, les jambes flageolent, la peau frissonne sous l’air froid, sous les assauts de tes mains. Chercher le regard qui me rendra belle, intéressante, exceptionnelle. Chercher le moment de rupture où je serai l’unique au présent. Chercher le cri qui vient du fond de la gorge, la cambrure ultime, le coup de reins dont viendra la délivrance. Alors parfois dans leurs yeux humides je me sens reine, noyée dans la multitudes de leurs amantes et des corps découverts j’ai la sensation de faire la différence.
A quoi bon. Se cambrer un peu plus pour sentir au plus profond, montrer la meilleur part de soi-même, capturer les dernières réticences.
Un papillon de nuit, à se brûler les ailes, se faire bouffer par un chat. Alors la peau scintille, sublimée par le plaisir, dans un râle incertain. Alors l’humide s’exhibe, le soubresaut secoue les derniers instants. Avant que tout retombe. Avant qu’on ne se sépare. Avant la fin.
La porte se referme sur une étreinte usée. La chambre est vide, les draps froissés. Quelques larmes lâchées entre deux soupirs. Le chat, lui, est toujours là.
Tes doigts sur ma peau, ta main, délicatement dégage la mèche de cheveux derrière mon oreille, tes lèvres dans mon cou. Respire.
Tu m’inspires
Ça
.
Regard clos sur la lenteur de tes gestes, tu m’embrasses encore, si doux, tendresse
Je me sens gauche et fragile dans tes bras, maladroite de ne plus savoir comment toucher un autre, tu m’intimides un peu j’avoue.
Faire l’amour, tu dis, moi je dis baiser, tu vois tes mots à toi racontent une histoire différente de la mienne, alors je veux m’inviter dans ton monde et inventer la suite avec toi. Me perdre, quelques heures dans ta bulle, deshabillée par ton regard sous la jungle de ton salon.
J’aime la façon dont tu respires
Il ya des phrases comme ça qui débutent une histoire, parfois, ou restent suspendues sublimes, figées dans l’éphémère infini de ma mémoire. Et je fais rouler ces perles encore et encore, chaleur dans mon ventre, souffle court, pensées humides
Il y a en toi des choses de plusieurs filles que j’ai aimées
Alors je vacille un peu, en dedans, mais juste assez pour me retenir. Troublée. Je veux croire que tu sais comment viser juste dans ton authenticité. Même s’il n’y a pas de rôles dans cette scène, juste moi qui parle trop, et ton corps, déposé sur le mien.
Je te veux je crois, ou tu décides, je veux ta bouche et tes mains tes doigts dans le fond de mon ventre peut-être, tes longs doigts qui attrapent ma nuque, je veux, ton torse contre mon dos tes mains sur mes fesses mes hanches, t’avaler, cambrée, me perdre, je veux, encore un peu, de ta
J’ai, ta peau. Ta peau, sa peau, nos peaux. Entre vous, enlacée, chaleur douce, et vos barbes qui piquent un peu. Les coeurs qui battent. Les mots qui hésitent. Mais doux, tout ça, si doux.
Vos peaux, ma peau, nos peaux, les respirations dans le noir qui s’accélèrent et s’approfondissent. Ma main sur ta nuque, ta main sur sa nuque, torses, ventres, pubis, bouches, fesses. Sexes prudemment humides.
Ça commence toujours comme ça, on dirait. Des caresses dans l’obscurité d’un soir, un peu de pudeur, ma bouche entre vous deux. Il y a eu lui et puis lui, pourquoi pas, tu disais que tu aimerais ça sentir le corps d’un homme contre le tien, et j’ai pensé : ce serait bon de te partager avec un autre.
Alors on y est.
T’es beau, il dit dans mon oreille. Mon amour-chaton, tes yeux brillants voilés d’une curieuse timidité. T’es beau, on pense alors ensemble. T’es beau quand tu hésites, t’es beau quand tu explores, t’es beau quand tu t’abandonnes. T’es beau quand tu te lances et que tu l’embrasses, un peu brusque, un peu timide, et que vos barbes s’emmêlent.
Je découvre le plaisir des mots chuchotés, la variation des textures de vos corps, les sensations de vos baisers-barbus sur mes cuisses et ma nuque. Qui de nous deux partage l’autre, qui est voyeur, qui s’exhibe. Je vous observe, je dis, vous êtes beaux, fourmis et papillons vibrent et envahissent mon ventre. Et puis je suis à genoux, bouche pleine de l’un et chatte remplie de l’autre, perdant doucement le sens et la tête, bâillonnée jusqu’au fond de ma gorge, transpercée de vos queues bandées. Je devine vos baisers, au dessus de ma cambrure, des baisers d’hommes, des baisers fiers, des baisers sensualité que je ne peux pas voir, et ça me rend folle, et la frustration m’excite encore plus.
Je vous sens monter et grossir, alors que mon corps ne sait plus par où ressentir. Je transporte les vagues de l’un vers le sexe de l’autre, et réciproquement. Tension ultime, contractions, explosions, orgasmes simultanés. Vos foutres partout dans mes orifices. Je tremble, je crois, je ne sais plus très bien ce qui m’habille, je suis nue sur ce lit entre vos deux corps, baisée, fébrile, épuisée ; aimante, comblée, apaisée. Je vous aime, tellement que je vous veux encore.
Il ya tant de détails que je ne peux transcrire ici.